Pâtes suisses: cornettes, coquillettes et autres
Cornettes, coquillettes, petites lettres, vermicelles: derrière tous ces noms qui nous sont familiers se cachent des valeurs sûres de la cuisine suisse. Ces formes originales sont la promesse de plaisirs gourmands. Sans compter que les pâtes alimentaires sont de bons fournisseurs d’énergie et s’accommodent de multiples façons. Il est grand temps, après avoir mis les pâtes italiennes à l’honneur, de prêter une plus grande attention aux pâtes bien de chez nous.
Jaune d’or et nourrissantes
Les chiffres se passent de commentaires: 66% de la production suisse de pâtes alimentaires sont des pâtes aux œufs (soit 30'464 tonnes en 2011; source: SwissPasta, l’Association de l’industrie suisse des pâtes alimentaires). Dans les pâtes sèches italiennes, les œufs ne sont pas courants. Mais chez nous, on préfère les pâtes aux œufs, qui donnent au produit une belle couleur jaune d’or. Les cuisiniers vantent aussi leur propriété de transmetteur de goût. Les œufs rehaussent la saveur naturelle des pâtes et du coup, influencent celle des autres ingrédients. Les sauces à la crème, par exemple, sont plus fines et ont un goût plus marqué. La quantité d’œufs dans les pâtes est prescrite par la loi. Pour un kilo de semoule de blé dur, la quantité minimum est de trois œufs. Les pâtes dites à 4 ou 6 œufs en contiennent donc davantage.
Les cornettes, les coquillettes et les petites lettres sont des habituées de la cuisine suisse, les cornettes arrivant tout en haut de la liste pour leur indispensable contribution au plat emblématique avec de la viande hachée. Les pâtes suisses sont connues en Suisse depuis plus de 280 ans: une note datant de 1731 confirme l’existence d’une machine à pâtes à Disentis. Au début, les pâtes étaient un produit de luxe. Leur production était compliquée et leur prix élevé. Les choses vont changer avec la fabrication industrielle et l’amélioration des possibilités de transport. Les pâtes sont dès lors d’un prix abordable. Enfin, les travailleurs immigrés italiens vont largement contribuer à leur popularité avec les macaronis et les autres pâtes sèches. Un produit si savoureux, si appétissant et si nourrissant devait forcément trouver sa place parmi des habitudes alimentaires, si profondément ancrées soient-elles. Dès 1920, la cornette, forme suisse la plus typique, figure régulièrement au menu des cantines des usines.
Du jaune au vert
À part les œufs, la recette de base des pâtes alimentaires est simple et les variantes d’autant plus nombreuses. Il faut de l’eau et de la farine, normalement de blé dur. Ce blé provient principalement des États-Unis et du Canada. Mais il est aussi possible d’utiliser du blé tendre et d’autres céréales: épeautre, PurEpeautre (épeautre à l’ancienne), emmer (amidonnier), amaranthe ou quinoa. Des céréales anciennes, comme l’emmer et l’épeautre, sont aussi cultivées en Suisse.
La pâte de base peut être colorée par des légumes, comme les épinards ou les tomates, ou encore par des épices, comme le safran. La Suisse possède un grand nombre de petites entreprises de pâtes alimentaires qui contribuent à la richesse de l’offre et proposent des créations très colorées. La créativité s’exprime dans des noms fantaisie qui vont droit au cœur des gourmets suisses.
Cornettes du lutteur et du chasseur
Ces noms fantaisie ont de quoi mettre en appétit les petits mangeurs, d’autant que certaines de ces cornettes sont à base de céréales originales. L’emmer (ou amidonnier), par exemple, est une variété millénaire qui pousse bien en Suisse et fait un retour remarqué dans nos assiettes (et dans les pâtes). Avec de bons œufs de la ferme et de l’eau de source voisine, les producteurs misent sur la qualité et la fraîcheur. Leurs pâtes sont souvent distribuées seulement dans la région de fabrication. Cela vaut donc la peine de jeter un coup d’œil sur les rayons des boulangeries de village et les magasins de ferme. Il arrive qu’un de ces produits sorte du lot et connaisse un énorme succès.
Repas primé
Les spaghettis de Bruno Hafner (Fidirulla – Entlebucher Pasta) sont un excellent exemple. Ce producteur privilégie les ingrédients de sa région. La céréale est cultivée tout spécialement pour Fidirulla par quelques petits paysans. En 2011, Hafner s’est vu décerner le Prix Biosphère UNESCO d’Entlebuch. Peu de temps après, les «Véritables spaghettis au PurEpeautre de l’Entlebuch» ont conquis le jury de la Journée mondiale des pâtes et remporté le premier prix. La fabrication de spaghettis est considérée comme la voie royale. Elle exige beaucoup de doigté, surtout au moment du séchage. Les pâtes d’épeautre de différents producteurs sont disponibles par exemple chez Coop.
Texte: Tiziana Ossola, Mise à jour le 12 juillet 2023