Carnaval: régal avant le carême
Merveilles, cuisses-dames, crêpes et oreillettes sont aussi inséparables du carnaval que les déguisements et les cliques. Toutes ces gourmandises frites dans la graisse ne lésinent pas sur les calories! Mais le carême succédant aux excès du carnaval, nous n’allons pas bouder notre plaisir!
Période de folie - période nourrissante
Réjouissances et ripailles
Pour beaucoup de gens, le carnaval est la plus belle période de l’année! Tout (ou presque) semble permis: se défouler, se déguiser, admirer les cortèges en simple badaud ou se régaler de friandises. Même sans être un aficionado, difficile de ne pas se laisser tenter par toutes ces douceurs.
Cuisses-dames, oreilles de lapin, rissoles, rouleaux de tabac, merveilles, bugnes et beignets... les formes, recettes et noms sont nombreux en Suisse.
Les fritures de carnaval peuvent avoir une forme allongée, en losange, recourbée, ronde ou plate, un bord dentelé, être fourrées ou non. Les plus connues sont les merveilles.
Inutile de tourner autour du pot: côté gras et malgré les apparences, les merveilles ne sont pas une mince affaire. Craquantes et super fines, elles cachent bien leur jeu: composées entre autres de farine blanche, œufs, crème et sucre, elles comportent, selon le fabricant, un tiers de matière grasse.
Un jeudi qui porte bien son nom
Jadis, manger gras était synonyme de manger bien et copieusement. Et avant les 40 jours de jeûne qui précèdent Pâques, les gens en avaient bien besoin.
Pour les fritures, on utilisait traditionnellement du saindoux (extrait du lard) ou du beurre clarifié. Aujourd’hui, on se sert d’huiles supportant les hautes températures, par exemple l’huile d’arachide.
Autrefois, le jeudi gras ou «jeudi sale» avant le mercredi des cendresdésignait le jour où l’on commençait à faire les fritures à la maison. Cette journée correspondait aussi à la dernière possibilité de tuer le cochon.
Le mot «sale» désigne ici la graisse, le saindoux. Ce sous-produit de l’abattage atterrissait directement dans la cuisine et servait à confectionner les fameuses gourmandises.
Jeûner pour faire durer les provisions!
Pendant des siècles, l’observance du jeûne interdisait la consommation de protéines animales, à l’exception du poisson, des grenouilles, des écrevisses et des escargots!
Mais plusieurs localités en Suisse demandèrent au pape une autorisation spéciale pour au moins utiliser des produits laitiers pendant le carême.
Autrefois, le jeûne imposé par l’Egliseavait aussi une signification pratique: la fin de l’hiver correspondait au moment où les provisions commençaient à diminuer. Et grâce aux préceptes de l’Eglise, on pouvait les faire durer plus longtemps.
Friture: pratique et tentante
La grande popularité que connaissait ce mode de cuisson s’explique par des raisons pratiques: jusqu’au 20esiècle, posséder un four à la maison n’était pas évident.
Or la friture a l’avantage de se pratiquer sur un simple fourneau. Elle nécessite uniquement une grande casseroleposée sur le feu. Le bain de friture doit suffire pour pouvoir retourner l’aliment plusieurs fois et l’arroser de graisse. Normalement, on en préparait tout de suite une grande quantité.
Les gâteaux frits dans l’huileet cette méthode de cuisson étaient considérés à l’époque comme le nec plus ultra. Pas seulement à l’occasion du carnaval, mais aussi des fêtes de famille, fêtes foraines ou journées d’action de grâce.
Ces friandises marquaient parfois le début d’une union. Les femmes en âge de se marier les offraient aux hommes pendant le carnaval. On raffolait de ces gâteaux - et surtout d’autres «douceurs» - tant et si bien que régulièrement l’Eglise interdisait ces offrandes jugées somme toute pas très catholiques!
Oreilles de lapin - frites et au lit
En Suisse, en Allemagne et en Autriche, les oreillettes (également appelées fantaisies)font partie des plus anciennes friandises de carnaval. Leur forme de triangle étiréest empruntée à l’oreille de lapin. Elles gonflent légèrement dans le bain de friture.
Elles doivent probablement leur origine à une véritable oreille de lapin que l’on avait coutume, au 14esiècle, de glisser dans le lit des enfants pour les aider à s’endormir. Reste à savoir si les oreillettes, aujourd’hui, aident encore les enfants à faire de beaux rêves...
Plusieurs recettes sont connues dès le début du 16esiècle. Mais les oreillettes n’ont pas toujours été sucrées. Non sucrées, on les mangeait avec de la salade.