Gibier et fruits: l’amour fou
Fini le temps où on laissait la viande mariner pendant des jours, mijoter pendant des heures et se noyer dans des sauces lourdes. Remis au goût du jour, les plats de gibier sont désormais légers et vite préparés, et leurs sauces délicatement parfumées. Le chevreuil, le cerf et le civet s’accordent à merveille avec les fruits d’automne: la viande possède une saveur légèrement douce qui contraste délicieusement avec le goût acidulé des fruits. Autant de raisons de profiter pleinement de ces plats de saison.
Les sauces raffinées sont la cerise sur le gâteau
Les sauces raffinées sont la cerise sur le gâteau Les morceaux tendres de chevreuil, de cerf et de sanglier sont parfaits pour une cuisson minute c'est-à-dire pour des plats vite préparés.
Mais une succulente sauce éclair ne saurait manquer: après avoir saisi la viande, on déglace les sucs et fait réduire un peu. Selon ses envies avec du vin rouge, du porto, du marsala ou un fond de gibier en bocal. Et pour donner un peu de pep à la sauce, on ajoute à la cuisson un oignon haché finement. Ensuite on filtre le tout et selon goût, lie avec un peu de maïzena pour une sauce claire ou avec de la demi-crème à sauce pour une sauce veloutée.
C’est maintenant que les fruits entrent en scène. Et en automne, nous avons l’embarras du choix. Les étals débordent de mûres, pruneaux, pommes, poires, coings, airelles, figues et canneberges.
Les baies seront ajoutées entières à la sauce et les autres fruits, en morceaux, cuits en les gardant croquants comme pour une compote. Et voilà la sauce terminée!
Côté épices, le choix ne manque pas non plus: badiane, cannelle, coriandre ou condiment pour pain d'épice, mais aussi herbes aromatiques au goût puissant comme le thym ou le romarin.
Comment les plats aigres-doux sont parvenus en Europe
Aujourd’hui, les plats aigre-doux nous évoquent immédiatement des classiques de la cuisine chinoise comme le poulet «sweet and sour».
Mais en réalité, ce mariage de saveurs est apprécié depuis longtemps chez nous, bien avant que nous ayons découvert la cuisine chinoise. Persans et Arabes avaient déjà l’habitude de cuisiner des plats salés auxquels ils incorporaient beaucoup de miel et de fruits.
En plus des épices tant convoitées, les marchands arabes introduisirent en Europe d’autres éléments caractéristiques de leur cuisine. On a retrouvé en Allemagne des textes et des recettes qui attestent de l’existence de préparations de gibier avec des fruits et du miel dès le Moyen Age. Elles étaient d’ailleurs excessivement épicées pour nos papilles d’aujourd’hui.
Moins c’est mieux
Marier les épices à tort et à travers ne correspond plus à notre idée d’une bonne cuisine. Car finalement, le rôle des épices est d’exalter les saveurs et les arômes des ingrédients, mais sûrement pas de les dominer.
De même, le sucré dans les plats salés ne doit nullement évoquer un dessert. Comme le gras il sert «simplement» de transporteur de goût. Le résultat le plus harmonieux est obtenu lorsque la teneur en sucre des fruits est présente dans le plat. Le goût sucré est alors idéalement compensé par l’acidité naturelle des fruits.
Surprenant, mais presque logique
Les adeptes d’une cuisine régionale et de saison associent automatiquement les produits du moment. Et il est évident que les plats de viande ne peuvent pas toujours comporter ou être accompagnés uniquement de légumes.
Or la présence de fruits dans les plats salés divise les fines bouches: certains gourmets adorent cette combinaison, d’autres par contre, ne l’apprécient pas. Il est intéressant de constater que cette réticence épargne le gibier. Le sucré-salé semble faire ici l’unanimité.
Peut-être avons-nous cela dans le sang? Car voilà plus de 10'000 ans, nos ancêtres chasseurs-cueilleurs associaient sans doute aussi fruits et gibier en automne. Sauf qu’il leur manquait la vaste palette d’épices dont nous disposons aujourd’hui.
L’accompagnement parfait
Ce sont naturellement les knöpflis et les spätzlis. Dans beaucoup d’endroits, les knöpflis accompagnés d’une compote de fruits tiennent lieu de repas du soir. Preuve s’il en était besoin que ces «pâtes», à la différence des spaghettis et des penne, font très bon ménage avec les fruits.
En version classique, les knöpflis sont servis purs, sans arômes ni épices. Mais il en existe aussi des parfumés qui s’accordent bien avec le gibier et les fruits, par exemple les knöpflis safranés. Autre variante très raffinée: les knöpflis à l’orange, pour lesquels il suffit d’incorporer à la pâte un peu de zeste râpé d’une orange bio. Le parfum de l’orange se marie bien avec le gibier et naturellement aussi avec les fruits.